Jean-Claude Garrigues, au sujet de sa magnifique Studio II

"Un bout d'histoire (je réalise soudain que nous avons 34 ans de vie commune... Vertige !) :

Achetée 2 500 FF en novembre 70 (je crois qu'à l'époque, cela représentait 6 fois mon salaire ! Folie furieuse !), c'était ma première guitare électrique (j'ai encore la facture). En fait, en entrant chez Major Conn, je n'étais pas vraiment décidé sur la marque et le modèle. J'avais joué sur des Fender qui ne me paraissaient pas mal, surtout une Jaguar (!) qui m'avait impressionné, car branchée sur un ampli terrible (j'étais jeune et naïf...). C'est en essayant plusieurs que l'attirance est devenue irrésistible... Je crois que c'est la clarté du son qui m'a scotché : tout ce que je jouais était éclatant. Comme j'hésitais quand même, le vendeur m'a discrètement poussé en... m'offrant la valise !
J'ai joué longtemps sur un ampli à tubes de marque Recta, d'un look atroce mais d'une puissance invraisemblable. J'ai grillé des tas de HP avant de comprendre que "60 watts" est à comprendre très différemment selon qu'on a des lampes ou des transistors... Il arrivait à tirer de ma Jaco un son extraordinaire, un parfait équilibre entre attaque et suavité. Avec un instrument pareil, tout semblait possible. D'ailleurs, aujourd'hui encore, et même sur des amplis médiocres, je m'émerveille de ces incomparables micros et je chante les louanges de Saint Benedetti.
J'ai fait partie de divers groupes (le premier s'appelait "Evil Machpro and his Fantastic Bluesmen"... Hum...), de divers styles, et elle s'est toujours adaptée sans rechigner à tous les traitements que je lui faisais subir. Les copains changeaient de guitare entre les morceaux. Moi, je changeais les réglages. La seule chose qu'elle a eu du mal à avaler, c'est la pédale wha-wha, qui la faisait larsener lamentablement.
Très vite, au bout de six mois, les mécaniques se sont "piquées" de minuscules boursouflures. J'étais catastrophé, pensant qu'en quelques années elles allaient être bouffées par la rouille. En fait, cela n'a plus évolué, et 34 ans plus tard, les micro-boursouflures sont toujours là, comme au premier jour... Pour le reste, la nacre a un peu jauni, le liseré de la caisse est un peu usé à certains endroits, les pull-off ont un peu creusé les espaces entre les sillets, mais rien que de très normal pour un instrument qui a autant d'heures de vol. Avec le même traitement, gros à parier que si j'avais finalement choisi la Fender Jaguar, il n'en resterait plus grand'chose.
Il y a deux ans, je me suis décidé à la faire réviser. Le mi aigu "frisait" un peu en bas du manche, le potentiomètre de volume crachotait (horreur !), et à force de régler les cales du chevalet au pifomètre, l'accordage devenait laborieux. Elle a été prise en main par un luthier de St Etienne (Loire), qui l'a chouchoutée, bichonnée, et lui a donné une deuxième jeunesse. C'est un jeune gars passionné que je recommande vivement : "l'Atelier des Guitares", rue Servet. Dans un coin de son atelier, il a une épave de Studio III qu'il prend tout son temps pour restaurer. C'est dire que c'est un type bien !
Maintenant que je suis vieux, le calme et la sérénité étant venus avec l'âge, elle coule des jours heureux pour une retraite bien méritée. De temps en temps, on se raconte nos souvenirs autour d'un petit blues tranquille...

(enfin... euh... hum... ça dépend des jours...)

 

Voilà pour un bout d'histoire. Et je m'aperçois qu'il ne m'en faudrait pas beaucoup pour en rajouter des pages et des pages... Mais ce serait de la gourmandise."

    Jean-Claude G.

 

 
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