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A André et
Roger,
Mes souvenirs des basses Jacobacci remontent aux débuts des années 80,
avec celles de Bernard Paganotti, que j'avais vu en photo (Bunny, ses
basses Weidorjiennes entre autres). En 1985 mon ami Alain Juliac me
proposa, comme souvent, de le suivre pour réaliser une interview d'un de
mes bassistes préférés : Bernard Paganotti, encore lui. Durant
l'interview Bernard me demanda sur quel matériel je jouais et me parla
des frères Jacobacci et de leurs instruments, en me disant que,
contrairement à ce que je pouvais imaginer ils n'étaient pas "hors de
prix". L'idée a longuement muri, il me fallait attendre un peu; je
venais juste d'acquérir une basse bâton Washburn Bantam 4 cordes
relativement, chère pour mon porte monnaie : 5.400 F.
1988 :
ma première Jaco (4
cordes), achetée seulement 5.700 F chez Guitare Village à Laurent
Murelli, qui collaborera un peu plus tard avec les frangins, avec la
série Amanda (et chez qui j'ai donné des cours de nombreuses années dans
les 90s).
1989 : je suis allé voir André et Roger avec mon carton découpé à la
forme de la basse 5 cordes que je désirai qu'ils me fabriquent, ainsi
que les détails suivants : largeur du sillet et du chevalet, espacement
entre les cordes, épaisseur du manche (approximative), un radius pas
trop arrondi, 24 cases, micros Benedetti (évidemment). D'août à octobre,
je suis souvent passé à l'atelier pour voir l'avancement du travail. Il
arrivait parfois à l'heure du café qu'ils ferment la boutique pour me
payer un coup au troquet d'à coté, André relativement silencieux et
Roger toujours très loquace.
Durant cette période j'y ai recroisé Bernard qui se faisait fabriquer
ses basses six cordes "très spéciales" en forme de poire. En fait, j'y
restais parfois plusieurs heures, juste pour le plaisir. Bien que
restant discret pendant qu'il bossait, Roger me racontait des anecdotes,
des histoires sur sa vie, son père, ses instruments, les musiciens ...
jusqu'au 26 octobre 1989 où je suis venu la chercher. Elle était
terminée. Cela m'avait couté seulement 8.300 F pour une basse de
luthier, dont tous les réglages et révisions resteraient gratuits
jusqu'à la fermeture de l'atelier. Quand on compare avec les prix des
instruments de série de l'époque, on comprend mieux le rapport
qualité/prix des instruments Jacobacci. Je tiens à préciser que le
manche, une fois réglé, ne bougeait absolument plus.
J'ai un tas de souvenirs ...
La précision avec laquelle ils travaillaient tous deux, les odeurs de
l'atelier, du bois, des vernis, qui resteront très longtemps dans ma
housse, l'ampli à lampe dont ils ne baissaient jamais le volume
lorsqu'ils branchaient les instruments et qui résistait toujours.
Un ou deux ans plus tard, lors d'une répétition, une mécanique s'est
cassée après une chute. André était déjà très malade et généreusement me
l'a remplacé gratuitement. Depuis elle a beaucoup souffert. Dans les
années 90, avec juste une seule formation, j'ai du faire 350 concert
avec et comme je ne jouais plus qu'elle ... corps fêlé à l'arrière, tête
fêlée en 1995 (le pianiste avec qui je jouais a poussé mon ampli
provocant la chute de la basse dans son étui), et cassée deux fois (1996
et 2006). En 1997, alors que je jouais à Avoriaz, j'ai dû trop tirer sur
la tige d'équilibrage et la corne s'est cassée. En rentrant j'ai
retrouvé Roger consultant chez Guitare Garage qui me l'a réparée. A la
même époque, en plus d'un refrettage, je souhaitais essayer d'autres
micros; j'ai donc fait monter des pavés Bartolini et les défonces ont
été modifiées. En 2006, elle est tombé à nouveau après une répétition.
Roger m'a gentiment proposé de la lui amener en Vendée pour la réparer;
comme j'aurais dû y faire deux aller-retour, je suis allé voir DNG, qui
a fait du super boulot. En 2007 j'ai fait remonter des pavés Benedetti
comme ceux d'origine. Seul défaut à mon gout, un niveau de sortie trop
faible et pas assez dynamique, malgré le boost, que ce soit avec les
Benedetti ou les Bartolini d'ailleurs. Ce qui m'a amené a attaquer les
cordes de plus en plus fort.
Cette basse est toujours avec moi et bien que j'ai possédé par la suite
une MusicMan Stingray 5 cordes et une Fender JazzBass American Series 5
corde, elle reste ma préférée et "je l'aime".
Bruno Maignan.
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